lundi 5 janvier 2015

L’incorporation en vaut-elle la peine?


Avantages de la constitution en société

 

En plus des reports d’impôt possibles résultant principalement du fait que le taux d’imposition de la société généralement est moins élevé,[1] la constitution en société peut présenter d’autres avantages fiscaux intéressants :

 

1. La constitution en société permet le fractionnement des revenus avec les membres de la famille souvent assujettis à un taux d’imposition inférieur à celui du dirigeant de l’entreprise. À titre d’exemple, le conjoint peut souscrire au capital-actions ordinaires de la société, au moment de sa constitution, en utilisant ses propres fonds dans le but de recevoir des dividendes plus tard.

 

2. Il est possible pour une société d’offrir certains avantages à ses employés, sans que ces avantages soient imposables. Un propriétaire d’entreprise non constituée en société ne peut bénéficier de ces avantages, car il ne peut être un employé de son entreprise. Parmi ces avantages, on retrouve les primes d’assurance-invalidité, les primes d’assurance-maladie d’un régime privé collectif et les prêts sans intérêt, si certaines conditions sont respectées.

 

3. Plus le taux d’imposition sur un revenu  est bas, moins on a besoin de liquidités pour payer des frais non déductibles, telles les primes d’assurance-vie utiles pour payer les impôts au décès.

 

4. Étant donné que la DGC de 750 000 $ est disponible pour un gain résultant de la disposition d’actions admissibles d’une petite entreprise, il est avantageux d’exploiter une entreprise par l’intermédiaire d’une société plutôt que personnellement. Sans l’utilisation d’une société, le particulier ne pourrait bénéficier de la DGC seulement s’il s’agit de biens agricoles admissibles ou si la totalité ou presque totalité des biens utilisés dans l’entreprise à titre de propriétaire ou par le biais d’une société de personnes étaient transférés à une société avant la vente.

 

Inconvénients de la constitution en société

 

Malheureusement il existe aussi des inconvénients à la constitution en société.

 

1. Des frais juridiques et comptables engagés lors de la constitution, tels que les frais pour l’obtention de l’acte de constitution, et engagés chaque année par la suite, tels la préparation des états financiers et des procès-verbaux, découlent de l’utilisation d’une société.

 

2. Sauf si un fractionnement de revenu est possible, les profits de la société doivent s’accumuler dans cette dernière pour que des économies d’impôt importantes puissent être réalisées.

 

3. Les pertes subies par une société n’ayant pas un revenu suffisant pour les absorber ne peuvent être utilisées par les actionnaires pour réduire leur propre revenu.



[1] 19% versus 49.97% pour un revenu gagné personnellement

La technique de mise à part de l’argent (MAPA)


Il s’agit d’une technique qui consiste à utiliser des fonds empruntés afin de payer les dépenses d’affaires faisant en sorte que les intérêts deviennent déductibles. Ainsi, le travailler autonome non incorporé utilise les fonds générés par son entreprise afin de payer ses dépenses personnelles.

 

Cette technique est plus intéressent lorsque le revenu net d’impôts du contribuable n’est pas suffisant pour rembourser la totalité des dettes personnelles.

 

En pratique, le travailleur autonome doit ouvrir deux comptes bancaires distincts, un pour déposer ses recettes d’affaires et un pour payer ses dépenses d’affaires en négociant une marge de crédit de type « dollar pour dollar », c’est à dire que pour chaque dollar de réduction de ses dettes personnelles, la marge de crédit disponible est augmentée d’un dollar.

À la fin de l’année, le contribuable a converti ses dettes personnelles en dettes servant à payer des dépenses d’affaires permettant ainsi la déduction des intérêts qui ne l’auraient pas autrement.

 

L’ARC s’est prononcée en faveur de cette technique lors de la publication de son bulletin d’interprétation IT-599 le 31 octobre 2003. Selon l’agence, cette technique est conforme au libellé de la L.I.R. Ainsi la RGAÉ n’est pas applicable[1].

 

La jurisprudence a validé également cette stratégie dans l’arrêt Singleton rendu par la Cour suprême du Canada en 2001, en instaurant le principe de la primauté de la réalité juridique des transactions sur celle économique.

 

Cette technique pourrait être utilisée par les associés d’une société en nom collectif ainsi que par des particuliers détenant des immeubles à revenus, sous réserve de quelques règles à respecter.

 

 



[1] L’ARC maintient la même position même après l’arrêt Lipson. Voir interprétation technique 2010-0373541C6 du 08 octobre 2010.

Frais de représentation sujet ou non à la limite de 50%


Règle générale de déductibilité

 

La règle générale est énoncée au niveau du par. 67.1(1) L.I.R (art. 421.1 L.I.), selon laquelle, la déduction des dépenses engagées pour des aliments, boissons ou divertissements est limitée à 50%[1] du moins élevé des montants suivants:

·       Le montant effectivement payé ou payable

·       Le montant qui est raisonnable dans les circonstances

 

De plus, ces dépenses doivent être engagées en vue de gagner un revenu d’entreprise ou d’un bien, ou dans certaines circonstances d’une charge ou d’en emploi. D’où l’obligation de conserver les pièces justificatives et l’identité des personnes qui ont bénéficié des frais (exemple : clients).

 

Au Québec, une autre limite égale à 1.25% du revenu brut qui dépasse 52 000$ s’ajoute à celle générale[2]. Toutefois, cette limite ne s’applique pas à l’égard des frais de repas consommés à un endroit éloigné d’au moins de 40 kilomètres du lieu d’affaires habituel du contribuable.

 

Cependant, il existe des frais de représentation non sujets à ces limites et par conséquent, déductibles à 100%[3] comme par exemple :

·       Si l’activité commerciale habituelle du contribuable consiste à engager de tes frais

·       Frais facturés distinctement aux clients

·       Cadeaux aux clients autres que des aliments, boissons ou divertissements

·       Frais reliés aux évènements organisés pour le bénéfice de tous les employés (jusqu’au maximum de 6 évènements par année)

·       Frais engagés dans le cadre d’une levée de fonds au bénéfice d’un organisme de bienfaisance

·       Au Québec seulement, le coût d’un abonnement (au moins 3 représentations) à des évènements culturels ayant lieu au Québec (exemple : concert ou pièce de théâtre)

 

 



[1] La limite est 80% pour les conducteurs de grand routier effectuant un déplacement admissible (par.67.1(1.1) L.I.R)
[2] Prévue à l’article 175.6.1 L.I. cette limite exclut les frais de représentation qui ne sont pas soumis à la limite de 50%. Elle ne s’applique pas également aux employés à commission mais elle s’applique aux travailleurs autonomes à commission
[3] Par.67.1(2) L.I.R & art.421.2 L.I.

FIN DU FRACTIONNEMENT DU REVENU DE PENSION AU QUÉBEC

Le fractionnement du revenu de retraite : La fin de l’iniquité

fiscale au provincial, en attendant le fédéral!!!

Lors du récent budget provincial déposé le 4 juin dernier, le ministre des Finances du

Québec a annoncé une mesure qui vise à assurer l’équité du mécanisme de

fractionnement des revenus de retraite entre conjoints et corriger ainsi une iniquité

qui a été mise en place par le fédéral depuis 2007. Cette mesure favorisait indûment

les retraités âgés de moins de 65 ans bénéficiaires d’une rente provenant d’un régime

de pension agrée (RPA) au détriment des autres retraités qui doivent attendre l’âge de

65 ans.

Le présent texte fait le tour de cette mesure de fractionnement en analysant les

conditions d’admissibilité et les différences de traitement fiscal entre le régime

d’imposition fédéral et provincial.

Conditions d’admissibilité

Tant au fédéral qu’au Québec, la condition indispensable pour déterminer si un revenu

pourrait faire l’objet d’un fractionnement, c’est son admissibilité au crédit d’impôt pour
revenu de retraite au fédéral au sens du paragraphe 118(3) L.I.R1.


Pour être admissible, chaque particulier membre d’un couple (cessionnaire et
pensionné au sens de la L.I.R.) doit s’assurer de remplir toutes les conditions suivantes2 :

  • Être marié ou vivre en union de fait;
  • Être résident du Canada à la fin de l’année civile ou immédiatement avant son
décès;
  • Avoir reçu un revenu de pension admissible.
De façon générale, les revenus de pension admissibles au fractionnement sont définis

au niveau du paragraphe 118(7) L.I.R. Cette définition change si le particulier n’a pas

atteint ou non l’âge de 65 ans avant la fin de l’année d’imposition.

Le tableau suivant récapitule les conditions d’admissibilité en fonction de la source de

revenu de retraite et l’âge du particulier.
Le fractionnement permettra à un particulier de déduire, dans le calcul de son revenu,
un montant maximal de 50% de son revenu de pension admissible au fractionnement3, à

condition que son équivalent soit inclus dans le calcul du revenu de son conjoint4.


Pour ce faire, un choix fait sur un formulaire prescrit doit être envoyé aux autorités

fiscales avant la date limite de production de la déclaration d’impôts personnels.

Toutefois, le pourcentage du fractionnement choisi au provincial peut être différent de

celui au fédéral étant donné la disparité existante au niveau de certains crédits d’impôts

qui tiennent compte du revenu familial et non de celui individuel.
Les avantages du fractionnement

Beaucoup d’articles ont été publiés depuis la mise en place du mécanisme de

fractionnement qui ont chiffré le montant des économies d’impôts annuelles gagnées

par le couple qui pourraient dépasser le seuil de 12 000 $ dans certains cas. La raison

principale étant les écarts de taux d’imposition entre les conjoints, surtout au Québec,

depuis l’instauration d’un nouveau palier d’imposition à partir de 100 000 $ et

l’imposition progressive de la contribution santé depuis 2013. Toutefois, il ne faut pas

perdre de vue que le fractionnement pourrait avoir aussi un impact défavorable à

l’égard de certaines mesures fiscales faisant réduire ou perdre des crédits d’impôts qui
auraient pu être accordés en fonction du seuil du revenu individuel5.

 
La nouvelle mesure annoncée par le dernier budget provincial

En 2007, toutes les provinces canadiennes ont suivi le fédéral en harmonisant leur

régime fiscal avec celui fédéral. Depuis la publication du dernier budget provincial,

Québec est devenu la première province à sortir du rang en imposant aux contribuables,

dès l’année civile 2014, l’atteinte de l’âge de 65 ans comme condition essentielle pour

être admissible au fractionnement du revenu de retraite. Cette mesure affectera

environ 85 000 ménages québécois (donc 170 000 contribuables) et fera économiser 52
millions de dollars au trésor public1.


Depuis son instauration en 2007, le mécanisme de fractionnement n’a pas cessé d’être

critiqué par les fiscalistes qui rapprochent aux autorités fiscales le favoritisme accordé

aux anciens employés qui reçoivent, avant l’âge de 65 ans, une rente d’un régime de

retraite mis en place par leur employeur, versus des contribuables qui ont épargné

durant plusieurs années afin de cotiser à leur régime enregistré d’épargne retraite

(REER) et qui doivent attendre leur 65éme anniversaire avant de bénéficier des

économies d’impôts reliés au fractionnement.

Malgré ces critiques, le ministre fédéral des finances a indiqué, à maintes reprises,

qu’elle n’a pas l’intention de modifier la L.I.R. en invoquant principalement comme

raison, le contrôle plus important exercé par les rentiers d’un REER, FERR ou d’un FRV

du moment des retraits des sommes accumulées dans ces différents régimes. En effet,

selon le gouvernement fédéral, il est difficile de déterminer, à ce moment, si un individu

est réellement à la retraite. Alors qu’un bénéficiaire d’un régime de pension agrée, il est

supposé avoir pris sa retraite.

Or, le dernier plan budgétaire publié par le ministère des finances du Québec a

démontré que plus de 70 % des bénéficiaires du fractionnement des revenus de retraite

avaient moins de 65 ans et qu’une grande part de ces contribuables continent d’occuper

un emploi leur procurant un revenu supplémentaire en plus de leur rente de RPA, et

bénéficier ainsi chacun du crédit d’impôt pour le revenu de retraite alors que dans les
faits ils ne sont pas des véritables retraités6.


C’est dans le but de corriger l’iniquité générée par ce mécanisme de fractionnement que

le dernier budget provincial a instauré cette modification qui s’appliquera d’une

manière rétroactive pour les six premiers mois de l’année 2014, ce qui obligera plusieurs

retraités québécois à revoir leur stratégie financière.

Conclusion

En conclusion, nous rappelons que le fractionnement du revenu de pension n’exige en

aucun cas un transfert réel d’argent, il s’agit simplement d’une « fiction fiscale » qui a

assez duré depuis 2007, ce qui a obligé le ministère des finances du Québec à mettre

fin à l’iniquité générée par cette mesure en attendant que le fédéral suive dans un

avenir très proche.

À notre avis, le refus du crédit d’impôt pour le revenu de retraite aux contribuables

âgés de moins de 65 ans ou la mise en place d’une limite au montant de la pension

fractionné, pourrait constituer des pistes envisageables afin d’atténuer, dans une

certaine mesure, cette iniquité faute de mesures fiscales immédiates plus efficaces.